Article rédigé par Aurélie.
Imaginez un bon bain bien chaud alors que l’hiver bat son plein. Ca tombe plutôt bien ce
moment, c’est ce dont beaucoup d’entre nous rêvent, dans la mesure où, n’ayant pas de
baignoire, ne pouvons nous y plonger – et jouer avec les bulles et autres accessoires alléchants
de la sorte-
Voilà une image assez forte de ce que celui ou celle qui a eu la chance de coupler Paris et son
quotidien, il fut un temps, peut bien assimiler: appelons ce concept, le manque de Paris.
Paris et ses contrastes, son hostilité aussi grinçante que touchante, sa prestance honorable qui
n’a d’égal que sa petite touche de mégalomanie, bref, avec Paris, on vit in medias res. Tout le
monde entre directement au beau milieu de tout et de rien, de beaucoup d’autres choses en
réalité. Ces paramètres donnent d’ailleurs naissance à toutes les tentatives d’échappatoires
modernes pour sortir de cette drôle de bulle que constitue la vie dans la capitale (comprenez
ici les spas, salons de thé, cinémas et autres week-end en banlieue, mais pas trop loin quandmême).
Paris dans toute sa splendeur englobe ses propres paradoxes. Même si les remous
trépidants de la vie parisienne peuvent t’enlacer jusqu’à t’engloutir, impossible de s’en lasser
durablement, telle une énième cuillerée de la célèbre pâte à tartiner chocolat noisette, Paris
ou la génératrice d’endorphines. Et c’est un phénomène auquel malheureusement, forcé de
constater, on ne peut goûter, une fois qu’on se trouve en dehors, j’ai nommé la Province.
J’insiste pour le P majuscule.
Les Provinciaux ne comptent pas pour des pruneaux, enfin! Il est intéressant de noter le curieux
mélanges d’admiration et d’amertume envers les parisiennes: souvent dépeinte comme plutôt
brune, de taille moyenne voire grande, le mollet ultra fin et armée de lunettes king size ainsi que
d’une frange, à la classe folle. Les clichés ont la vie dure. Mais personne n’a dit que le rythme
allait être simple pour tout un chacun qui s’apprête à battre le pavé et obtenir les faveurs de la
plus belle ville du monde. Nos cousins anglophones disent “no pain, no gain”, et autant vous
dire à quel point ceci colle si bien à la peau des candidats à la vie parisienne. Car on le sait,
mais une piqûre de rappel me semble nécessaire, pour profiter pleinement des joyaux purement
intrinsèques à dame Paris, mieux vaut avoir une bourse plutôt fournie et ne pas avoir trop le
tournis.
Attention, habiter dans le Sud, par exemple, a ses charmes, ses attraits et surtout, bien des
partisans. La vie au soleil demeure, somme toute, très agréable, si ce n’était pour cet espèce
de grand fossé de silence qui se creuse peu à peu autour des journées et comme Baudelaire,
le spleen de Paris nous gagne. Une forme d’angoisse, relativement similaire à celle de la page
blanche. Peut-être une peur du vide que le nombre fort diminué de boutiques dans les autres
villes ne saura en vain combler. Paris, je suis désemparée, tu me parais bien loin. Quelques
souvenirs épars de ce kaléidoscope culturel en constante ébullition ne suffisent plus à calmer
les symptômes que font naître la tiédeur et le contre -coup de l’art de vivre plus obséquieux à la
provinciale. Jules Renard disait que si on rajoute deux lettres à Paris, on obtient le paradis. Moi
je voudrais ajouter qu’en changeant deux lettre de l’enfer, on obtient le non-Paris: l’envers. Bon,
j’admets avoir rajouté une troisième lettre (toute règle a ses exceptions après tout). L’idée, c’est
qu’une fois loin de Paris, on sent que rien n’est plus vraiment à sa place, ou presque. Le monde
ne tourne pas autour de Paris, certe, mais rien ne semble plus tourner rond.
C’est pénible quand-même et parfois hors de propos, tous ces discours surfaits et fatigants sur
la dualité Paris/Province. Dans certains domaines, oui, il y a un clivage. Le problème, s’il y en a
un pour de vrai, doit être ailleurs. Cependant, si l’on nuance et que l’on parle plutôt de décalage,
vivre dans la grande cohue de la fourmilière parisienne donne sincèrement l’impression d’être,
d’une certaine manière, au centre de tout, de se permettre d’oublier toute limite, de s’ouvrir sur
le reste du monde. Paris, ses paillettes et son goudron, ses grands mots et ses accablantes
erreurs de parcours. Une gamine qui ne vieillit jamais et que sa nièce new-yorkaise n’est pas
prête d’éclipser. Alors, non, ce n’est pas une histoire de privation qui créé le manque, c’est bel
et bien que Paris fait perdre la tête, et qu’on en redemande toujours, parce que ça ne s’explique
pas. Toulouse, ma ville natale, me vaudra toujours un infini respect et l’amour inconditionnel,
mais Paris, elle, conservera toute ma passion et les papillons dans l’estomac bien après ma
mort.
Voilà c’est tout à fait ça ,j’aurais pu écrire ce texte à la virgule près .
Joli texte et billet. Je suis d’accord avec vous, habitant proche de Paris (Pantin dans le 93). Toute ville a ses avantages. Par exemple Brest pour sa pluie et ses verts paturages, oui !
Profs Mudor
J’ai tout simplement adoré cet article ! Bravo…